Le Haut Conseil pour l’Avenir de l’Assurance Maladie (HCAAM) mène depuis plusieurs années une réflexion sur l’articulation entre assurance maladie obligatoire (AMO) et assurance maladie complémentaire (AMC). Le constat est le suivant : malgré le reste à charge (RAC) le plus faible de l’OCDE (6,9% de la dépense courante de santé au sens international), le système mixte français est confronté à deux défis majeurs :
• Selon le HCAAM , la performance générale indéniable du système cache des disparités selon l’âge, le niveau de revenu ou la situation professionnelle : le taux d’effort1 était en 2017 beaucoup plus élevé pour les personnes âgées de plus de 80 ans (6,6 % contre 3,8 % en moyenne), les personnes à revenu modeste restent sur-représentées parmi les personnes n’étant pas couvertes par un contrat de complémentaire santé2, même si en théorie elles bénéficient aujourd’hui de la Complémentaire Santé Solidaire3 (CSS) , à titre gratuit ou quasi gratuit. Au sein même de la population couverte, des disparités existent entre personnes couvertes par un contrat collectif et personnes couvertes pas un contrat individuel (les premières sont généralement plus couvertes que les secondes et bénéficient davantage d’aides publiques).
• La hausse structurelle des dépenses de santé remet en cause la soutenabilité du système. Plusieurs facteurs contribuent à tirer les dépenses de santé vers le haut : le vieillissement de la population, le coût élevé des nouvelles thérapies, l’essor des maladies chroniques et le risque épidémique. Dans ce contexte, l’efficacité de la dépense et l’investissement dans la prévention apparaissent comme des enjeux majeurs, afin de limiter la hausse du taux d’effort des ménages.
À la demande du ministre des Solidarités et de la Santé, le HCAAM a analysé les impacts concrets de quatre scénarios d’évolutions de ruptures envisageables du financement du système de santé, aboutissant au rapport publié le 14 janvier 2022.
- Le scénario 1 propose des améliorations paramétriques, sans remettre en cause l’architecture globale du système actuel.
- Le scénario 2 propose l’instauration d’une « assurance complémentaire obligatoire, universelle et mutualisée ».
- Le scénario 3, communément appelé « Grande sécu », propose l’augmentation des taux de remboursement de la Sécurité sociale.
- Enfin, le scénario 4 consisterait en un décroisement des champs d’intervention de l’assurance maladie obligatoire (AMO) et de l’assurance maladie complémentaire (AMC).Entre fuites organisées dans la presse, diffusion d’un pré-chiffrage des scénarios sans informations préalables aux membres, ou encore politisation accrue des différentes propositions, cette publication du rapport du HCAAM ne s’est pas faite dans un contexte de sérénité totale. Sans amputer la crédibilité de l’institution, ces différents soubresauts ont néanmoins empêché la tenue d’un débat posé et argumenté sur les principales préconisations réalisées par les experts.
Cette note vise à analyser les scénarios dits de « rupture » du rapport, soit les scénarios 2, 3 et 4, ainsi que celui dit du « bouclier sanitaire », scénario de rupture, présent en annexe du rapport. Le scénario 1 d’évolutions incrémentales sera traité dans une note ultérieure, afin de pousser l’analyse des différentes mesures proposées par le HCAAM et l’opportunité d’autres mesures.
Si le rapport du HCAAM est documenté et permet d’alimenter le débat, nous pouvons porter un regard critique sur les scénarios proposés. En effet, malgré leur bonne volonté apparente, ils sont porteurs d’effets pervers pouvant générer d’importants coûts pour les populations ciblées.
Afin de faciliter la comparaison entre les scénarios, ceux-ci seront présentés sous trois angles :
- Leur effet sur la population couverte par les complémentaires santé,
- Leur effet sur le panier de soins pris en charge
- Lorsque c’est pertinent, leur effet sur le niveau de garantie.Les scénarios seront jugés sur leur capacité à relever, ou non, les deux défis décrits plus haut : l’accès aux soins pour les Français et la soutenabilité du système.
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