Le 2 décembre 1959 à 21h13, il y a 60 ans jour pour jour, le barrage de Malpasset[1], cédait sous l’effet de pluies diluviennes. Une vague de 45 m de haut déferlant à plus de 70 km/h déversa dans la plaine de l’Argens 50 millions de m3 d’eau. 20 minutes plus tard, elle atteignit les quartiers ouest de Fréjus et balaya tout sur son passage avant de se jeter dans la mer. On dénombra 423 victimes et les dégâts matériels furent considérables : routes, voies ferrées, fermes et immeubles furent totalement détruits. Durant la seconde quinzaine de novembre 1959, 500 mm d’eau étaient tombés en dix jours dont 130 mm la seule journée du 2 décembre. La crue très violente qui s’ensuivit provoqua un accroissement très rapide du niveau de la retenue. Pour éviter d’endommager le pont en construction de l’Autoroute Esterel-Côte d’Azur situé 1 km en aval, la vidange du barrage fût décidée beaucoup trop tard et ne permit pas d’éviter ce désastre considéré comme la catastrophe la plus meurtrière de l’histoire française.
Vues aériennes de la plaine de l’Argens
Gauche : après la catastrophe de Malpasset
Droite : après les innondations de fin novembre 2019
De telles précipitations sont périodiques dans l’arc méditerranéen à cette époque de l’année. Leur violence est toujours à l’origine de crues importantes et de débordements de rivières. Les inondations meurtrières suites aux crues de l’Argens, de la Siagne et du Riou fin novembre et début décembre 2019 sont venues nous rappeler cette dure réalité. Doit-on pour autant corréler ces crues comme on le fait de plus en plus systématiquement avec le réchauffement climatique ?
Climat et météo sont deux sciences distinctes quant à leur temporalité et leur spatialité.
La météorologie est la science des nuages, de la pluie et du vent. Elle se définit par quelques valeurs instantanées et locales de température, de précipitations, de pression ou d’ensoleillement. Un événement météorologique se produit sur le pas de votre porte, dans l’heure, la journée ou au plus la semaine.
Le climat s’attache au contraire à décrire des événements météorologiques sur des périodes de plusieurs dizaines d’années mais aussi sur de vastes zones géographiques. Il prend en compte les conditions moyennes de l’atmosphère et dépend d’un grand nombre de paramètres comme les radiations solaires, la végétation, la composition de l’atmosphère ou encore l’évolution de la surface glaciaire.
La catastrophe de Malpasset vient nous rappeler 60 ans après que des pluies diluviennes fin novembre sur l’arc méditerranéen sont un phénomène connu dont l’occurrence est répétitive. Même si le climat en accélère la fréquence, elles relèvent davantage de la météo et non du climat.
Pourtant, pour des raisons idéologiques, par opportunisme ou simplement par ignorance, l’opinion publique, les média et le monde politique ont aujourd’hui une fâcheuse tendance à les confondre. Toute crue, inondation, cyclone ou sècheresse qui pour l’essentiel relève de la météo est de plus en plus souvent assimilée au dérèglement climatique. Ainsi en utilisant le slogan bien commode « ceux qui dérèglent, doivent payer »[2], plusieurs communes françaises ayant subi de lourds dégâts suite à de fortes inondations ont décidé sous couvert de dérèglement climatique, d’attaquer en justice…un grand groupe pétrolier. Une méthode parfois bien commode permettant à des édiles ayant délivré de façon inconsidérée certains permis de construire en zones réputées inondables de se défausser vis-à-vis de leurs administrés.
[1] Mieux connu sous le nom de « Barrage de Fréjus »
[2] https://www.francetvinfo.fr/meteo/climat/climat-14-communes-francaises-accusent-total_3175083.html