Pour faire suite à la conférence donnée à Kedge Business School à Marseille sur ce sujet il y a un peu plus d’une semaine, il me semblait intéressant de faire une sorte de compte-rendu de ces technologies. Je me permets donc de reprendre le titre de cette conférence ici. Les ChatBots sont parmi nous depuis très longtemps. Tout du moins, nous utilisons ces principes d’aide et en sommes demandeurs depuis toujours. Dans la mythologie grecque, Héphaïstos, le dieu du feu et de la forge, réalisera des servantes d’or qui l’assistent dans ses travaux (Iliade 18, 418-419), six « charmeuses » faites d’or, deux chiens gardiens du palais d’Alkinoos, etc…
Le premier « Chatbot », Eliza, fut créé en 1966 par Joseph Weizenbaum, professeur au MIT (Massachusetts Institute of Technology), aux États-Unis. Le programme était conçu pour émuler un psychiatre et impressionna tellement le monde de l’Intelligence Artificielle (I.A.) qu’on pensait qu’il suffirait d’un peu l’améliorer pour que cette machine passe avec succès le fameux « test de Turing ». Ce test consiste à poser des questions à un humain et à une machine, à l’aveugle. Si l’humain qui pose les questions ne sait pas différencier ses interlocuteurs, s’il pense qu’il n’y a pas de robot derrière le rideau, alors, le test est concluant. On l’a vu il y a quelques jours, une I.A. a largement échoué à un problème simple de mathématiques : « donnez le résultat de 1+1+1+1+1+1+1.. » La machine a été perdue !
Dans les années 90, Microsoft lançait son premier assistant virtuel, Clippy, qui, il faut bien l’avouer, aura excédé toute une génération d’utilisateurs de la suite Office de l’époque. Clippy apparaissait en rebondissant sans prévenir, toujours prêt à servir… Souvenez-vous ! 🙂
Vint ensuite Siri, le premier véritable ChatBot personnel qui ouvrira la voie aux Alexa, Google Home et même maintenant un ChatBot intégré dans la dernière Freebox, OK Freebox, qui vous permet de piloter le module Delta à la voix.
Du côté des entreprises, c’est l’engouement général, avec 80% des sociétés qui souhaitent s’équiper d’un ChatBot d’ici fin 2020. La stratégie est principalement d’assurer un contact client, que ce soit sur l’avant-vente, la vente ou le suivi. D’autres applications sont possibles en interne, comme le lancement en 2018 d’un Chatbot « R.H. » en interne chez Onet, pour répondre à 80% des questions des salariés à propos du passage à l’imposition à la source. Le salarié devient alors le client du ChatBot et enrichit la base de données, surtout lorsqu’on greffe une intelligence artificielle au ChatBot.
Dans son évolution première, le Chatbot n’embarquait pas d’I.A. et répondait de façon linéaire. Les progrès des NLP (Natural language processing), une branche de l’informatique et de l’I.A. et qui, comme son nom l’indique, travaille sur les processus du langage naturel, ont été extraordinaires : on peut aujourd’hui décrypter de nombreuses phrases. L’I.A. s’est greffée sur ces outils et a permis d’ouvrir le champ de réponses, en sortant d’un arbre linéaire préétabli. Encore une fois, les gros acteurs prennent une avance considérable, en alimentant leurs algorithmes de millions d’exemples de phrases récoltées via les utilisateurs de ces assistants vocaux. Les I.A. enregistrent, apprennent et n’oublient rien.
Alors il faut bien réaliser la chose suivante : la surface du village mondial se rétrécit encore avec l’apparition de reconnaissance vocale très évoluée. Quand un ChatBot chinois ou américain sera capable de dialoguer avec un client français de manière absolument naturelle, les commerciaux locaux auront des soucis à se faire face à la déferlante de produits étrangers moins chers ou technologiques, vendus bien plus facilement. Est-on prêt face à une concurrence encore un peu gênée aujourd’hui par la barrière de la langue ? Est-on prêt à lutter commercialement face à des ChatBot étrangers prêts à répondre en français au client, 24/24h, 7/7j ? Finalement, la concurrence se déplace encore sur l’aspect technologique : possédons-nous de telles technologies ?