Le monde du travail est en plein changement. Bouleversé par la révolution numérique, il subit une mutation inédite, transformant profondément ses fondements, son fonctionnement et ses caractéristiques. Entre dé-spatialisation du travail et évolution des métiers, cet avenir nécessite d’être accompagné par une révolution des compétences. Dans ce contexte, l’émergence d’un socle de compétences comportementales est une réponse à l’incertitude inhérente à cette évolution. Parmi elles, les soft skills sont sans conteste les nouvelles stars du marché du travail. Devenues l’alpha et l’oméga du recrutement en France, il est très rare aujourd’hui que ces compétences douces ne soient pas invoquées par un recruteur lorsqu’il s’agit d’analyser les grandes tendances de fond régissant le marché du travail. Un engouement qui a fini par transformer une matrice de compétences en véritables produits marketing : on ne compte plus les coachs, les formations, les consultants et les producteurs de MooC promettant une acquisition très rapide de ces compétences qui feront de son détenteur une pépite rare pour les recruteurs.
Néanmoins, au-delà des arguments marketing, l’émergence des soft skills traduit un véritable bouleversement du marché du travail, où le comportement accompagne la technique dans les priorités de recrutement. Il s’agit donc d’une nouvelle réalité, à laquelle le management doit s’adapter, et une nouvelle donne avec laquelle les entreprises doivent composer. Leur importance rend indispensable l’adoption d’une approche plus méthodique que ce soit dans leur traitement ou dans leur valorisation. Si les soft skills sont en passe de devenir la nouvelle norme dans le recrutement, il faut d’autant plus y accorder une attention et un soin tout particulier pour adapter les actifs à ces nouveaux standards. Ces compétences nouvellement mises en avant sont une chance pour tous les métiers à fortes interactions sociales, mais aussi pour les NEET, qui pourront y trouver une chance de rebond et une possibilité de poursuivre leur carrière malgré leur non-qualification.
Dans cette étude, nous nous intéressons à la notion de soft skills, en proposant notre propre définition de ce concept tout en mettant en avant leur intérêt réel pour les actifs; nous analysons leurs rôles dans la résolution des déséquilibres structurels du marché du travail; et nous proposons une nouvelle matrice d’acquisition et de valorisation de ces compétences, pour faciliter leur diffusion, notamment par les moins qualifiés.
Résumé des propositions
- Faire du CPF l’outil de gestion et de financement des carrières des actifs.
- Changer la saisonnalité du versement des fonds CPF et permettre aux actifs de préempter les versements à venir.
- Appliquer une allocation CPF spécifique aux NEET, financée par l’Etat.
- Prendre en charge les NEET dès leur sortie de cursus pour s’assurer qu’ils disposent des compétences comportementales socles.
- Transformer les pédagogies classiques pour réussir la transmission des soft skills.
- S’appuyer sur les acteurs associatifs et les entreprises de formation pour diffuser au maximum ces compétences générales.
- Mettre plus en avant l’expression orale et le travail en groupe dès les petites classes.
- Développer une logique de certification par badge, adjacente aux diplômes, pour rendre visible ces compétences.
- Rendre systématique la réalisation d’une mission dans une association, ou dans une entreprise, pour tous les allocataires du RSA.
- Développer un « radar de compétences » unique à chaque individu, pour visualiser, signaler et évaluer les soft skills détenues.
- Développer une skill Chain valorisant les compétences, les savoirs et les expériences d’un individu.
- Accompagner la révolution des soft skills d’une évolution du management en entreprise.
- Inscrire au RNCP (répertoire national des certifications professionnelles) les formations apportant des soft skills.
- Développer une nouvelle clé de répartition du financement des formations aux soft skills.
- Déployer un grand plan dans les compétences, alliant transformation de la formation, investissements dans les compétences et coordinations entre les acteurs.